La paracha Michpatim suit celle de Yitro, celle des 10 commandements; elle commence par « Vé », ce fameux « Vav » de transition pour bien expliquer que ces deux parachiot sont liées, Michpatim c’est la suite, la déclinaison de Yitro.

Yitro c’était les 10 paroles, un condensé de la loi, dans Michpatim on développe, on y trouve 53 mitsvot, pour la plupart régissant le rapport des hommes entre eux.

 

Ces lois sont d’une étonnante modernité. Citons en juste quelques unes.

 

– La chemita, c’est à dire laisser la terre se reposer tous les 7 ans. Un principe d’écologie d’une grande actualité aujourd’hui où l’on vient tout juste de comprendre qu’il faut arrêter le piller la terre et ses ressources naturelles.

 

– La séparation des pouvoirs : un roi, un prêtre et un prophète aux commandes  du royaume; séparation des pouvoirs, contre pouvoir, plus de 2500 ans avant Montesquieu et sa théorie sur la « séparation des pouvoirs », modèle qui inspirera toutes les démocraties et républiques qui naîtront le siècle suivant.

 

– Ne pas surcharger un animal; le respect de animaux, la reconnaissance de leur souffrance, la cause animale; ici aussi 3000 ans d’avance sur des préoccupations naissantes au 21ème siècle, et encore pas dans tous les pays.

 

– Le traitement des « esclaves », en fait des serviteurs (le terme en hébreu employé est « eved », c’est ainsi qu’est qualifié ,par exemple, Eliezer le fidèle serviteur d’Abraham, tout sauf un esclave, plutôt un prince); esclaves ou serviteurs ils méritent le respect, des traitements dignes, et doivent être affranchis après une certaine période. Une révolution complète à l’époque, et rappelons nous que l’esclavage n’a été aboli qu’au 19ème siècle.

 

– S’occuper de la veuve et de l’orphelin, c’est à dire des plus démunis, un commandement maintes fois répété dans la Bible; une préoccupation permanente de l’autre, de celui qui est dans le besoin. Une nécessité de solidarité et notamment avec les plus démunis.

 

– Porter attention à l’étranger, le commandement le plus renouvelé dans la Bible, 35 fois; c’est dire son extrême importance. Aujourd’hui cette mitsva résonne plus particulièrement avec le nombre de plus en plus important de migrants, donc d’étrangers dans nos sociétés; et ce 1er réflexe de rejet, de méfiance qui va à l’encontre de ce commandement biblique.

 

La loi du talion.

Talion a pour origine talis, ce qui signifie en latin « tel », « pareil ».

Chapitre 21 verset 24 :

« Oeil pour oeil, dent pour dent, main pour main, pied pour pied ».

La loi la plus mal comprise de toute la Bible sans aucun doute.

Elle caractérise généralement, dans l’esprit des gens un système de vendetta, si tu m’as crevé un oeil alors je t’en crève un.

Or il ne s’agit absolument pas de cela; au contraire nos sages expliquent qu’il s’agit de compenser financièrement tous ces agressions à la hauteur du préjudice physique et moral subi par la victime. Et ils rajoutent qu’en plus de l’argent, l’agresseur doit rechercher le pardon de la victime et donc aller à sa rencontre, entamer un dialogue, un repentir qui se veut réparateur pour les deux parties.

Donc exactement l’inverse d’une vendetta aveugle et impitoyable.

 

Mais alors pourquoi avoir employé une formule aussi ambiguë, qui peut porter à confusion ?

Rachi nous répond : La Torah ne peut pas , ne doit pas se lire seule, sans commentaires , sans explications, sans la loi orale, sans les commentaires de nos Sages, sans tout ce qui a été ensuite consigné dans le Talmud (Michna et Guémara). Faute de ne rien y comprendre, ou pire de faire d’horribles contres-sens.

Et cette formulation ambiguë, qui ne peut que porter à confusion, vient bien nous rappeler l’indispensable loi orale, les enseignements de nos rabbins et de nos Sages.

Ne jamais prendre le texte au pied de la lettre, y apporter toujours une grande attention, une lecture scrupuleuse, fouillée, et chercher à comprendre, à affiner son jugement en se faisant aider des enseignements du Talmud, de nos Sages et en y apportant  toujours un regard critique.