Nous venons de terminer le livre de Béréchit et nous allons en ouvrir un deuxième, celui de Chémot.

Pourquoi ouvrir un deuxième livre ?
Pourquoi ne pas continuer dans le même livre ?

H’amicha h’oumchei Torah

Tout le monde connaît l’expression, c’est ainsi qu’on appelle la Bible, ou plutôt la Torah.

C’est cette expression qu’on emploie par exemple dans la fameuse chanson de Pessah, à la fin de la Hagadah, sur les nombres. Et qu’est ce qui est cinq ? H’amicha h’oumchei Torah.

Littérallement les cinq cinquièmes de la Torah.

Mais quelle est cette dénomination bizarre ? La Torah c’est un livre ou bien cinq ? Et bien ni l’un ni l’autre. En fait ce sont cinq livres qui n’en forment qu’un.

Et pourquoi ne pas s’être contenté d’un seul livre ?

Pour souligner que chaque sefer, chaque livre représente un niveau de révélation différent. En fait chaque livre est une Torah en soi.

Béréchit nous parle d’identités individuelles, de personnes, des pères et des mères d’Israël, alors que Chémot va nous parler d’une identité collective, ce livre va nous conter les identités fils, les fils d’Israël, les enfants d’Israël.

Et pourquoi ces cinq livres en forment un seul, la Torah ?

Car si chacun représente une révélation différente, il existe une certaine logique, un ordre, une construction. Avec Béréchit tout démarre d’individus hors normes, d’une famille, de un à douze, puis à soixante dix, pour se terminer à six cent mille lors de la sortie d’Egypte. Dans Chémot d’une famille on passe à la naissance d’un peuple et au don de la Torah; ensuite dans le troisième livre Vayikra D.ieu nous livre son projet, un idéal; le quatrième Bamidbar c’est la chute, la traversée du désert, des catastrophes (ce n’est pas si facile, même si le projet est déjà décrit, il n’est peut être pas à l’échelle humaine); et pour finir avec Dévarim en apothéose avec l’entrée en terre d’Israël, une entrée dans la vie concrète, dans le monde des hommes.

Vé élé

C’est ainsi que commence le livre et la paracha de Chémot. « Et voici ». « Et voici les noms des fils d’Israël ».

C’est une expression bien connue dans la Bible. En fait on retrouve deux expressions voisines mais un peu différentes; « Vé élé »: « Et voici », ou bien « Elé » : « Voici ».

Lorsqu’on emploie la seconde « Elé » c’est pour décrire quelque chose de nouveau qui vient remplacer, effacer ce qu’il y avait avant. « Elé toldot Noah », par exemple, « Voici les les engendrements de Noah ».

Par contre quand on emploie « Vé élé », « Et voici » c’est pour décrire, certes quelque chose de nouveau, mais qui vient puiser ses racines dans le passé, qui vient compléter ce qui précédait.

Et donc ici pour ouvrir le livre de Chémot, c’est bien « Vé élé » qui est employé, le livre de Chémot vient donc ouvrir en effet un nouveau chapitre, une aventure collective, la naissance d’un peuple (et non plus l’histoire d’une famille), mais en se nourissant de tout le passé, du livre de Béréchit.

Les fils vont se nourir de l’identité, de l’histoire, des enseignements des pères.

Le don de la Torah

La Torah va être donnée dans ce livre de Chémot. La Torah va être donc donnée au peuple nouvellement constitué. La Torah n’a pas été donnée aux pères, aux patriarches ou aux matriarches, pourtant des personnalités exceptionnelles; non elle est donnée à tous, au peuple. La Torah appartient à tout le monde, ce n’est pas uniquement une Torah pour les sages.

Le collectif se dit en hébreu « tsibour », composé de trois lettres : tsadé, bet, rech. Ces trois lettres nous renvoient aux trois mots suivants : Tsadik, bénoni, racha; le juste, le « commun des mortels », le mauvais. Ceci pour bien nous signifier que la Torah est donnée à tout le monde, c’est la Torah des tsadikim, celle de « monsieur tout le monde » et également celle des racha, des impis. La même Torah s’applique à tous.

Qu’y a t il dans ce livre de Chémot ?

Nous avons déjà appris (dans un autre article du blog) que les parachiot vont deux par deux (les zouguiot), par couple.

Le livre de Chémot comporte 11 parachiot

Les deux premières « Chémot » et « Vaéra » nous parlent des préparatifs de la sortie d’Egypte. Il est à noter que les 210 années d’exil en Egypte nous sont à peine contées et que le récit s’attarde surtout sur la sortie de l’esclavage.

Les deux suivantes « Bo » et « Béchalah » décrivent la sortie d’Egypte à proprement parlé.

Cette sortie d’Egypte est comparée à un bébé qui est expulsé du ventre de sa mère.

Israël vient de naître avec la sortie d’Egypte.

Puis viennent « Yitro » et « Michpatim » : voilà le don de la Torah et le détail des enseignements. Voici la carte d’identité, la « téoudat zéout » du peuple d’Israël, du nouveau né.

Et reste alors cinq parachiot, un nombre impair, peu pratique pour former des couples.

Ces cinq parachiot s’organisent de la façon suivante:

Les deux premières « Térouma » et « Tétsavé » c’est le projet, l’ordre divin de construire un tabernacle, un « makom », un endroit, une place pour faire résider la Torah. Ce fameux temple portatif.

Puis toute seule la paracha « Ki tissa » : la paracha du veau d’or, la catastrophe, la chute, la déflagration.

Et enfin les deux dernières du livre de Chémot « Vayakel » et « Pékoudé » qui décrivent la réalisation du tabernacle.

Et comme souvent nous trouvons ici le schéma suivant : un projet, une intention, puis une chute, des difficultés et ensuite la réalisation, le concret. Un schéma classique pour nous enseigner qu’entre un projet et sa concrétisation il faut souvent, toujours passer par des moments difficiles qu’il s’agit de surmonter.