La circoncision est le moment le plus constitutif de l’identité juive.
Durant les huit premiers jours rien ne se passe, on observe que l’enfant se porte bien.
Le nouveau né n’a pas encore de nom.
Tout commence le 8ème jour. Le calendrier est intangible à tel point que la circoncision est l’une des rares mitsvot, commandements, qui doit avoir lieu quelque soit la date, même à Chabbat
ou à Kippour.
L’enfant va être circoncis et recevoir son nom. Par ces deux actes il va devenir un membre à part entière de la communauté d’Israël.
La circoncision se dit Brith Mila. Brith : l’alliance. Mila : la coupure.
La combinaison de ces deux mots indique bien que la brith mila n’est pas un simple geste chirurgical, la coupure du prépuce. Il s’agit de l’inscription dans la chair, et à un endroit à très forte charge symbolique, un signe distinctif rappelant l’alliance.
La brith mila est l’un des premiers commandements bibliques. D.ieu donne l’ordre à Abraham de circoncire tous les mâles de sa maison. Abraham est le 1er à s’appliquer à lui même
ce commandement. C’est à ce moment de l’histoire que D.ieu lui change son nom de Avram il devient Abraham.
Le changement de nom, l’attribution du 1er nom intervient toujours à l’occasion d’une transformation physique.
Jacob devient Israël en se luxant la hanche dans son combat avec l’ange.
Saraï devient Sarah en devenant féconde.
Le nouveau né acquiert un statut en recevant un nom et en changeant de corps.
Il n’y a pas dans la Torah d’explication spécifique à ce geste. Le texte dit juste que ce sera le signe d’une alliance entre D.ieu et l’homme de génération en génération.

Quels sont les acteurs de cette pièce?
Tout d’abord l’enfant, le garçon.
Puis le père qui est sensé pratiquer lui même l’intervention, mais qui la délègue à un spécialiste le mohel, le 3ème personnage.
Il y a également le sandak, celui qui porte le bébé, un parent proche, souvent le grand père, un oncle,..un parrain, une autorité morale pour l’enfant qui l’accompagnera toute sa vie.
Le prophète Élie est aussi présent, même si on a peu de chance de le voir.
Elie est le prophète sensé être l’annonciateur du messie. Chaque enfant entrant dans la communauté juive est ainsi un messie potentiel.
Mais alors que des hommes ? Et la mère ?
Et bien oui, c’est l’un des sens profonds de la brith mila.
Après 9 mois de parfaite fusion avec la mère, après l’événement souvent traumatique  de l’accouchement, l’enfant est pris, arraché, pour une 1ère fois à l’intimité de sa mère, pour entrer dans la communauté d’Israël. Il ne faut pas sous estimer la charge émotionnelle que représente cette coupure à tous les sens du terme.

La nomination, oui à la brith mila on nomme l’enfant, on lui donne son nom hébraïque.
Chaque nom est porteur de sens, et révèle l’identité d’une personne.
D’ailleurs la 1ère question que Moïse adresse à D.ieu quand il se révèle à lui lors du passage du buisson ardent n’est elle pas : quel est ton nom ?
Donner un nom à un être c’est l’inscrire dans un projet parental, dans une histoire familiale, et un héritage collectif.

Coupure et séparation dans le judaïsme.
Le judaïsme a un TOC, un trouble obsessionnel compulsif, celui de la séparation. Nous passons notre temps à différencier, le cacher du non cacher, le Chabbat des jours profanes, le lait de la viande, le lin de la laine, le juif du non juif, l’ashkénaze du séfarade , l’homme de la femme,…etc
Mais qu’est ce qui en jeu dans la séparation, qu’est ce qui se joue ici, chaque fois qu’il est question de distinction ?
L’enjeu de l’espace, de l’entre deux.
Chaque fois qu’il est question de séparation, de coupure dans le judaïsme, il est toujours question de surgissement d’un possible, d’un nouveau, c’est à dire d’un autre.
Et c’est pourquoi il faut faire de la place, de l’espace, pour que la relation devienne possible, et qu’une alliance soit envisageable.
Ces coupures sont nécessaires.
Abraham se coupe de sa terre natale, il coupe les animaux en deux pour marcher entre eux, pour sceller une alliance avec le divin il coupe son nom pour y glisser une lettre, il coupe sa chair et celle de sa descendance pour sceller cette alliance avec D.ieu.
On ne peut pas établir autrement une alliance avec le divin, avec un autre, s’il n’y a pas eu de séparation.
Ce qui est en jeu dans la séparation, dans la coupure, c’est le surgissement de l’altérité.