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Le 17 Tamouz
Ce jeûne (en juillet) marque le début d’une période de deuil qui dure trois semaines et se termine le 9 Av (en août).
La tradition juive associe ce jour à plusieurs événements qui vont tous dans le même sens et marquent le début d’un processus de destruction.
C’est ce jour que Moïse brisa les premières Tables de la Loi à la suite du péché du veau d’or.
Bien plus tard, le sacrifice quotidien fut interrompu lors du siège de Jérusalem par les romains. Une première brèche apparut ce jour-là dans les murailles de la ville sainte.
Enfin, Apostomos installa une idole dans le Temple et brûla un rouleau de la Torah, toujours un 17 Tamouz.
On constatera que tous ces évènements marquent symboliquement une perte du sens. La Torah serait devenue trop faible dans le coeur des juifs pour les empêcher de chuter. La faute du veau d’or en particulier marque l’incapacité de sortir de soi-même et de rompre le cercle (veau et cercle sont le même mot en hébreu) de la pensée limitée pour s’élever vers autre
chose, la Torah céleste. Cet échec n’est pas historique mais guette tout un chacun au quotidien, que ce soit dans le narcissisme occidental, le dogmatisme intellectuel, ou encore chez certains juifs engoncés dans leurs certitudes. Chacun est donc concerné et doit briser le petit cercle de son propre veau d’or.
La période des trois semaines entre le 17 Tamouz et le 9 Av
Cette période est marquée par plusieurs restrictions. Durant ces trois semaines, la tradition demande d’éviter d’acheter de nouveaux vêtements, de prononcer la bénédiction «Chéhé’héyanou » (par exemple pour un fruit nouveau). On ne se coupe pas les cheveux et
l’on ne célèbre pas de mariage. On évite également de passer en jugement car la période est considéré comme néfaste.
Il faut comprendre cette série de restrictions dans leur contexte historique. Dans l’ancien temps, acheter un vêtement était une chose exceptionnelle qui coûtait très cher, on allait rarement chez le coiffeur… des choses qui peuvent nous paraître totalement banales, ne
l’étaient pas.
C’est pourquoi, si l’on veut garder l’esprit de ces restrictions, il serait logique de les appliquer à différents aspects de notre vie. Dans cet état d’esprit, on devrait éviter quoi que ce soit d’exceptionnel à ce moment-là.
Afin de garder l’esprit de la tradition, il serait bon de ne pas trop multiplier les plaisirs durant ces trois semaines et de consacrer un peu de son temps à l’étude du judaïsme et de son histoire. Tout en prenant des vacances et un peu de bon temps, on peut en profiter pour
essayer d’être un peu plus scrupuleux sur la pratique des mitsvot.
C’est le moment notamment d’amorcer le retour intérieur vers une vie plus spirituelle. C’est le moment d’amorcer un processus de Techouva qui nous mènera jusqu’aux fêtes de Tichri.(Roch Hachana et Kippour). Pour cela, le moment des vacances peut être tout à fait propice à
un retour sur soi, sa famille, son monde intérieur.
Le début du mois de Av
Durant les neuf jours qui précèdent le 9 Av, on ne mange pas de viande et on ne boit pas de vin. En fait, le principe de la restriction va en augmentant au fur et à mesure que l’on s’approche de la date fatidique du 9 Av.
Le 9 Av
Situé au cœur de l’été (fin juillet – début août) ce jeûne est le plus important de tous après Kippour.
C’est un jour de deuil. Il vient clore les trois semaines de contrition commencées avec le petit jeûne du 17 Tamouz.
Le jeûne du 9 Av est très ancien, il était déjà pratiqué durant la période du deuxième Temple et marquait la destruction du premier Temple (- 586). Cependant, le deuxième Temple ayant été détruit en 70 à une date proche (également durant le mois de Av), on associe au 9 Av les
deux destructions et symboliquement l’exil en général.
La mishna associe cinq évènements dramatiques à la date du 9 Av :
-La faute des explorateurs au moment de la sortie d’Egypte
-La destruction du Premier Temple en -586
-La destruction du Second Temple en 70
-L’échec de la révolte de Bar Kokhba, qui s’acheva sur la destruction de la forteresse de Betar
-Jérusalem labourée symboliquement par les romains
Un jour sous le signe du malheur
La tradition juive lui associe toutes sortes d’évènements dramatiques par la suite (Talmud brûlé à Paris, expulsion des juifs d’Espagne, etc…). Certains de ces évènements ont effectivement eu lieu à cette date (le plus surprenant est le début de la guerre de 14-18),
d’autres n’ont rien à voir mais lui sont associés pour des raisons symboliques. Parfois les persécuteurs des juifs la choisissaient en connaissance de cause.
Le fait est qu’on a fini par considérer la période comme défavorable et néfaste, ce qui relève d’une pensée discutable et même contestable d’un strict point de vue juif. Le temps serait-il déterminé et serait-il découpé en tranches favorables ou défavorables, tout au long de l’année ?
Au moyen âge certains rabbins en étaient totalement convaincus.
De nos jours on trouve encore chez une partie du judaïsme (chez certains fondamentalistes) une tendance à mettre ce principe de déterminisme historique en avant. Le but étant surtout de chercher à convaincre les gens de suivre la religion plus strictement en « montrant » comme
tout cela est logique, impressionner et donc jouer sur la crainte.
Ce genre d’approche est contestable et l’on peut la qualifier de démagogique ou de manipulatrice.
Avant d’affirmer avec sérieux un tel déterminisme historique, il faudrait faire une étude statistique de quelque ampleur ; mais il y a de fortes chances qu’on constaterait que les malheurs arrivent à tout moment et qu’aucune période de l’année n’est plus néfaste qu’une autre.
Ce qui est sûr c’est que durant l’antiquité cette période était celle des invasions et des sécheresses parfois dévastatrices et sources d’épidémies.
Certains trouveront absurde une telle vision déterministe de l’histoire, il n’empêche que la symbolique demeure et la commémoration également.
Il est donc légitime d’associer symboliquement à cette date différents grands drames de l’histoire juive. C’est en ce sens que la Mishna demeure bien évidemment pertinente dans son enseignement, car elle crée un lien de sens entre différents épisodes, mythiques ou historiques, qui relèvent tous du même fondement, une cassure entre Israël et D.ieu. Et c’est à
ce niveau symbolique que nous devons rester attachés aux rites et significations du 9 Av.
Au delà de l’Histoire, le judaïsme considère que les êtres humains sont en exil d’eux-mêmes. La perte du Temple représenterait donc beaucoup plus que la chute d’un bâtiment et d’une institution, elle serait liée à l’exil ontologique de l’être humain en ce monde et à sa difficulté d’y faire régner l’harmonie.
C’est à dire que dans le fond, nous sommes en deuil de ce que nous n’avons pas encore réussi à construire. C’est pourquoi il nous faut réfléchir en ce jour au sens de l’histoire juive, à l’éthique, à l’amour d’Israël dans toutes ses nuances, même celles qui nous sont éloignées, à
l’idée d’une humanité spirituelle et solidaire construisant l’harmonie. Nous jeûnons donc pour nous souvenir que nous n’avons pas fait assez pour construire un monde meilleur.
Dans ce contexte, le jeûne du 9 Av n’a rien perdu de son sens, bien au contraire.
À partir du site massorti.org
André Bensimon
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